Culte du 12 février 2023
Prière de repentance
« Seigneur notre Dieu,
Nous avons bien souvent préféré nos désirs à ta volonté.
Avons-nous suffisamment consolé ceux qui pleurent ?
Avons-nous toujours été artisans de paix ?
Avons-nous eu faim et soif de justice ?
Avons-nous secouru les persécutés pour la justice ?
Nous avons eu du mal à nous aimer nous-mêmes
Et nous avons trop souvent méprisé notre prochain.
Et toi-même, notre Dieu, la source de la vie, nous t’avons trop souvent oublié.
Pardonne-nous Seigneur,
Viens au secours de notre faiblesse.
Toi qui nous aimes encore et toujours,
Accorde-nous ton pardon.
Fais-nous entrer dans ton chemin de vie,
Pour avancer et accomplir de bonnes choses.
Au nom de Jésus-Christ, Amen.
Déclaration du pardon
Ceux qui se tournent vers Dieu avec confiance reçoivent de Lui: la certitude de leur pardon et la grâce d’une vie renouvelée…
Avec Jean, nous dirons :
« En effet, voici comment Dieu a manifesté son amour pour nous :
Il a envoyé son Fils unique dans le monde afin que nous ayons la vie par lui.
Et l’amour consiste en ceci: Non pas en ce que nous avons aimé Dieu, mais en ce que lui, Dieu, nous a aimé le premier.
Et il a envoyé son Fils pour être le sauveur du monde.
Dieu est amour !
Deuteronome 30, 15-20
15 Regarde, j’ai placé aujourd’hui devant toi la vie et le bonheur, la mort et le malheur. 16 Ce que je t’ordonne aujourd’hui, c’est d’aimer le Seigneur, ton Dieu, de suivre ses voies et d’observer ses commandements, ses prescriptions et ses règles, afin que tu vives et que tu te multiplies, et que le Seigneur, ton Dieu, te bénisse dans le pays où tu entres pour en prendre possession. 17 Mais si ton cœur se détourne, si tu n’écoutes pas et si tu te laisses entraîner à te prosterner devant d’autres dieux et à les servir, 18 je vous le dis aujourd’hui, vous disparaîtrez ; vous ne prolongerez pas vos jours sur la terre où tu entres pour en prendre possession en passant le Jourdain. 19 J’en prends aujourd’hui à témoin contre vous le ciel et la terre : j’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta descendance, 20 en aimant le Seigneur, ton Dieu, en l’écoutant et en t’attachant à lui : c’est lui qui est ta vie, la longueur de tes jours, pour que tu habites sur la terre que le Seigneur a juré de donner à tes pères, Abraham, Isaac et Jacob.
Matthieu 5, 17-37
17 Ne pensez pas que je sois venu pour abolir la Loi ou les Prophètes. Je ne suis pas venu pour abolir, mais pour accomplir. 18 Amen, je vous le dis, en effet, jusqu’à ce que le ciel et la terre passent, pas un seul iota ou un seul trait de lettre de la Loi ne passera, jusqu’à ce que tout soit arrivé. 19 Celui donc qui violera l’un de ces plus petits commandements et qui enseignera aux gens à faire de même sera appelé le plus petit dans le royaume des cieux, mais celui qui les mettra en pratique et les enseignera, celui-là sera appelé grand dans le royaume des cieux.
Prédication enregistrée

Prédication : Denis Turpin
- Mise en situation :
Dans 10 jours commence le Carême ! Carême, Quarantième, pour se retrouver, pour méditer mais avant de commencer ce temps de recherche intérieure, il faut préparer le terrain, l’aplanir. Sinon comment entrer pleinement dans le temps d’une heureuse méditation.
Je vous propose ce matin de faire le point : où en sommes-nous ? Nous tous et chacun d’entre nous ? Nous avons dans la joie de Noël accueilli la venue de Jésus, nous avons fêté cet heureux événement mais après ? Nous avons lu, écouté, médité, prié et maintenant ? Avons-nous produit « un fruit digne d’un changement radical » comme nous le demandait Jean ? Avons-nous été « baptisé de l’esprit saint », faisons-nous des efforts pour aller vers les autres ? Avons-nous suivi l’exemple de Jésus qui a su résister aux tentations ?
- Contexte :
Si ma prédication est axée sur Matthieu 5, je souhaiterais aussi mettre ce texte en parallèle avec l’extrait du Deutéronome proposé pour ce jour.
Dans Matthieu 5, nous sommes au début de l’évangile et de ce fait au début des trois années du ministère de Jésus. 3 années de cheminement à travers la Palestine qui le conduira à Jérusalem et au Golgotha. Jésus est ici au bord du lac de Tibériade, homme parmi les hommes. Il s’entoure de ses premiers collaborateurs, des gens simples, de Galilée, comme lui. Recrutés sur leur lieu de travail, ils quittent tout pour le suivre. A mesure qu’il parcourt la Galilée, la Judée, la Transjordanie, la foule grossit car « sa renommée se répandit dans toute la Syrie » nous dit le même Matthieu au chapitre 4. Des gens humbles, souffrant, oppressés aussi bien par l’occupant romain sur les plans économique et politique que par leurs autorités religieuses sur le plan spirituel. Son premier enseignement, il le fait « sur la montagne », probablement au-dessus du lac de Tibériade, près de Génézareth. Il s’agit du plus long enseignement oral du Nouveau Testament comprenant entre-autre, les Béatitudes et le Notre Père.
Justement à propos des Béatitudes qui marquent le début du chapitre 5 : 10 paroles, 10 appels à vivre le présent, qui ne peuvent que nous renvoyer au Décalogue de l’Ancien Testament. Un véritable discours de libération, pour tous ces gens qui suivent Jésus, plein de promesses pour l’avenir.
Mais c’est ici que le texte biblique nous rappelle combien il peut être dérangeant, combien il peut bousculer nos certitudes.
Alors qu’à travers ce « sermon sur la montagne », on aurait pu penser que Jésus venait bouleverser la Loi ancienne, rompre les amarres, il vient au contraire rafraîchir les espoirs : « Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes » (v.17) : non, je ne suis pas là pour plaire, pour gagner une élection ou un auditoire. Non, Jésus est là pour dire ce qu’il a à dire, même si ça ne doit pas toujours être agréable à entendre pour les foules qui le suivent.
Même surprise dans l’extrait du Deutéronome : alors que trop souvent on pense que le Dieu du premier testament est un Dieu dur, jaloux, qui ne tolère pas l’infidélité, qui décide de la vie et de la mort, ici, dans ce qui pourrait être considéré comme le testament de Moïse, en tout cas ses dernières paroles, nous nous retrouvons devant un Dieu qui laisse le choix, qui nous montre la bonne voie mais ne veut en rien nous imposer un chemin de vie. « Je place devant vous la vie et le bonheur, la mort et le malheur (…) choisissez donc la vie… »
- L’enseignement de Jésus :
Alors, qu’est-ce que Jésus est venu nous enseigner dans ce texte de Matthieu ? …puisque 4 fois dans cet extrait, nous avons à faire à un enseignement de Jésus.
Le début du « cours » est un peu rude ! « jusqu’à ce que le ciel et la terre passent, pas un seul iota ou un seul trait de lettre de la Loi ne passera » sinon il sera « appelé le plus petit dans le royaume des cieux » ! Heureusement que nous n’avons pas une lecture intégrale de la Bible, car nous serions bien embêtés par ces paroles de Jésus…lui-même a déjà passé une grande partie de son enseignement à transgresser la Loi de Moïse et à libérer les gens d’une pratique étroite, à la lettre, de la Bible ! Quant à nous…
Peut-être dit-il cela parce que déjà ces dix paroles avaient été de moins en moins respectées. Que la foule qui le suivait savait aussi s’arranger pour les contourner, les éviter, les oublier, comme aussi aujourd’hui, nous pouvons nous arranger souvent avec les enseignements de Jésus ou de la Bible en général.
Donc Jésus veut ici revenir aux sources car il ne veut pas opposer le temps de la Loi (l’Ancien Testament) à celui de la Grâce (le Nouveau Testament). Non, Jésus proclame la Loi plus la Grâce, avec ce verbe « accomplir » qui à l’origine signifie « remplir », c’est-à-dire réaliser pleinement la Loi, la mener à perfection, lui redonner son sens vrai alors qu’elle est devenue une sorte de Code à la fois Civil et Religieux, une coquille vide, comme s’il lui manquait quelque chose pour bien l’interpréter.
Pour les juifs qui l’écoutent, la Loi ce sont d’abord les 10 commandements et ce Décalogue est bien évidemment à mettre en lumière avec le début de ce texte dans Exode 20, verset 2 « Je suis le Seigneur ton Dieu, c’est moi qui t’ai fait sortir d’Égypte, de la maison de servitude ». Donc le Décalogue ne doit pas être compris comme un jugement potentiel qui condamnerait tous ceux qui ne le respectent pas mais comme une promesse, que l’on retrouve dans le Deutéronome : si tu es de ceux qui m’aiment, alors je te protégerai, je te mettrai à l’abri de toutes les transgressions mortifères.
Ces textes nous ouvrent alors vers un Dieu miséricordieux et bienveillant qui ne juge pas mais veut sauver. Voilà pourquoi toujours en Dt 30, il rappelle au peuple, par la voix de Moïse, que ce Décalogue indique deux chemins possibles, celui de la Vie et celui de la mort. Et il nous adresse cette supplique : « choisis la Vie ! »Sans nous l’imposer : c’est à toi, à chaque croisée de chemins de ta vie de choisir la Vie, même si tu as ta liberté de choix.
Puis deux fois dans ce texte, Mathieu commence par « Vous avez entendu… », anaphore répétée plus loin dans ce même chapitre, en tout 4 fois. Sous-entendu, vous savez – ou vous ne savez plus – parce qu’on l’a dit à vos ancêtres et Jésus poursuit « mais moi, je vous dis » : A nouveau pour Jésus il ne s’agit pas de supprimer la Loi mais au contraire de l’approfondir, d’aller plus loin, de lui donner de la consistance. Dieu ne tient pas la comptabilité de nos actes, les bons comme les mauvais, il sonde le fond de nos transgressions (meurtre, infidélités, offenses, colère, vengeance…), au fond de nos cœurs.
De ce fait, si en société on peut être bien sous tous rapports on peut néanmoins au fond de nous-même avoir le cœur le plus dur. Que nous dit Jésus : « laisse ton offrande là, devant l’autel » au lieu de faire ton offrande sur l’autel, au lieu de paraître, au lieu de mimer le bon chrétien, « va d’abord te réconcilier avec ton frère », va d’abord choisir le chemin de Vie que je te propose, choisi la lumière plutôt que l’obscurité, fais le point avec toi-même, regarde-toi dans la glace et extirpe l’ivraie qu’il y a en toi (ou ton œil droit, ou ta main droite…), celle qui t’emprisonne et qui fait que tu es pécheur aux yeux de Dieu.
« Que ta justice surpasse celle des scribes et des pharisiens » ! Mais c’est très difficile, ça ! Les Pharisiens étaient des gens très rigoureux, ils étaient capables d’observer précisément la loi écrite et la loi orale. Ils ne trahissaient ni le plus grand ni le plus petit des commandements, ils étaient irréprochables ! Comment prendre ce chemin de l’accomplissement que me demande Jésus ?
Permettez-moi cet écart…il m’arrive parfois d’échanger avec quelques personnes sur ma foi ou ce en quoi je crois. Assez souvent je tombe sur des gens qui me disent « alors toi, tu es chrétien ». Et cette affirmation ne me plaît pas, non pas parce que j’ai une honte quelconque à m’affirmer chrétien. Non, parce que dans ce cas je réponds toujours cette phrase qui me plaît davantage : « Je ne suis pas chrétien, j’essaie de l’être…et ce n’est pas facile ! ». Oui, je me sens souvent « le plus petit dans le royaume des cieux » parce que pécheur, parce que je m’éloigne souvent des commandements. Et puis, comment aurais-je réagi si j’avais été présent, là dans la foule avec Jésus ? En fait, je m’aperçois qu’il n’y a pas de bons ou de mauvais chrétiens, mais pardonnez-moi, que nous sommes tous un peu chrétiens-pécheurs dont le Salut dépend de cette grâce imméritée accordée une fois pour toute par Jésus le Christ.
- Conclusion :
Donc accomplir la Loi, trop difficile ?
Le principal est d’abord d’entrer dans ce chemin de vie que nous propose Dieu par la voix de Moïse comme de Jésus…et être des serviteurs pas trop inutiles…C’est pourquoi je souhaiterais ajouter à notre texte un verset supplémentaire, le verset 37.
« Que votre oui soit oui, que votre non soit non, tout le reste vient du malin »
Au mieux, Jésus nous demande d’être vrais avec nous-même. Là est sa radicalité, comme son message a pu dans cette lecture nous paraître parfois radical. Si nous choisissons le chemin de la Vie, alors allons jusqu’au bout de ce cheminement, sans nous laisser entraîner à nous prosterner devant d’autres dieux, à servir d’autres discours.
Dans notre société, n’hésitons pas à prendre des positions claires, des oui qui ouvrent des portes sur des chemins inconnus, des non aussi, qui ferment des portes avec des conséquences imprévisibles…que nous accepterons.
Acceptons nos engagements, sans faux-fuyants, sans reniements. C’est de cette manière que nos contemporains discerneront à travers nous, le message de Notre Seigneur. Jésus nous laisse libre de nous engager vers un oui ou un non d’une simplicité radicale. Tu peux en effet rejeter l’ensemble des commandements mais n’oublie pas les paroles qui ont été lues aujourd’hui. Souviens-toi que cette Grâce, si tu l’as reçue et que tu en vis, si vraiment elle te donne de l’oxygène et une paix intérieure, alors par tes gestes, tes paroles, par tes réconciliations, ta justice pourra dépasser celle des Pharisiens.
Avant d’entrer dans le temps du Carême, comme une porte entrouverte, je voulais vous proposer cette prière de Marion Muller-Colard :
« Dans ta bouche, peser mes mots, me souvenir que mon frère est un fils pour toi, le regarder avec tes yeux.
Passer mes choix au crible de ta Loi, en conscience de Ta fidélité, choyer mes propres alliances.
Que mes « oui » soient « oui » et qu’ils résonnent longtemps.
A ton écoute, faire taire les voix de la convoitise qu’insinuent le doute et ternissent mes trésors.
A ton image, avoir la parole claire, insinuer rarement.
Éclaircir ma voix pour porter loin l’écho de ton Évangile, petites et grandes vérités taillées dans le vif de nos vies »
Peu importe les faux-semblants ! sans détruire, nous aurons accompli. Et nous entrerons le cœur pur dans le temps de Carême.
AMEN.